Le fromage au XVIIème et au XVIIIème siècle

07. Le fromage au XVIIème et au XVIIIème siècle

     L’Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers, éditée de 1751 à 1772 sous la direction de Diderot et D’Alembert décrit longuement les fromages de l’époque.

     Au début du XVIIème siècle, Olivier de Serres raconte que les premiers fromages venaient d’Auvergne « connus dans tous les lieux de France, d’une mer jusqu’à l’autre », puis les Bries.

     Il donne mille et une recettes de fabrication, de conservation, d’affinage (lit de vin, huile d’olive, vinaigre, eau de vie, froment,…) et de cuisine pour les fromages.

     En France, les premiers fromages importés étaient ceux de Suisse, d’Italie, de Turquie et d’Hollande. Dans  le Nouveau Monde, la plupart des historiens datent les débuts de la fabrication du fromage au Canada à l'arrivée des bovins amenés par Samuel de Champlain en Nouvelle-France.
     Après 1610, le nombre de colons augmente et les troupeaux s'agrandissent. En fait, les vaches dites " canadiennes " (ou Black Jersey) descendraient de celles qui débarquèrent ici en provenance de Normandie et de Bretagne vers 1660. À cette époque, des fromages étaient déjà fabriqués dans nombre de fermes selon des procédés originaires de diverses régions de France. Certains documents attestent que les fermiers acadiens fournissaient des fromages aux navires en partance pour les vieux pays.

     L’Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers, éditée de 1751 à 1772 sous la direction de Diderot et D’Alembert décrit longuement les fromages de l’époque, comme par exemple les pâtes cuites type Comté ou Gruyère :

« On fait le fromage cuit dans des chaumes construites sur les sommets aplatis des plus hautes montagnes des Vosges pendant tous le temps qu’ils sont accessibles et habitables, c’est-à-dire depuis la fonte des neiges, en Mai jusqu’à la fin Septembre, où les neiges commencent  à couvrir ces montagnes.
     Une chaumière destinée au logement des markaires et de leurs vaches, et placé au milieu d’un district affecté pour les pâturages, a donné le nom à ces chaumes. Le terme de Markaire est consacré pour indiquer les pâtres qui ont soin des vaches, et qui préparent le fromage, ainsi que ceux qui sont à la tête de ces établissements économiques. De Markaire on a formé Markairerie, qui signifie également et la chaumière, et la science de faire les fromages cuits. Ces habitations sont composées d’un logement pour les markaires, d’une laiterie et d’une écurie pour les vaches ; le plus souvent la laiterie n’est pas distinguée du logement des markaires, mais il y a toujours à part une petite galerie destinée à placer les fromages qu’on sale sur des tablettes de planche de sapin fort larges.

     Le corps de ces constructions est fait de madriers de sapin placés horizontalement les uns sur les autres, et maintenus par de gros piquets. L’intervalle des madriers est rempli de mousse et d’argile, ou scellé de planches : toute cette cage, qui n’a pas plus de sept piés d’élévation, est surmonté par une charpente fort légère en comble, couverte de planches. L’écurie est le plus souvent un bâtiment séparé de l’habitation des markaires ; on a soin au-dessous d’une petite source, telle qu’il s’en trouve fort fréquemment sur ces montagnes élevées. L’eau conservée d’abord dans un réservoir qui domine ces habitations, est conduite par des tuyaux de sapins mis bout-à-bout, dans le logement des markaires, et surtout dans l’écurie. …/… Dans le logement des markaires, qui est aussi leur laiterie, on remarque d’abord le foyer qui est placé à un des angles du bâtiment sans tuyau de cheminée. Quatre ou cinq assises de granite ou de pierre, de sable disposées en forme circulaire en composent toute la maçonnerie. D’un côté, on aperçoit un baril où l’on conserve du petit-lait aigri, et que l’on tient toujours exposé à l’action modéré du feu ; de l’autre est une potence mobile, à laquelle on suspend une chaudière pleine de lait, qu’on place sur le feu et qu’on retire à volonté ; la forme circulaire du foyer est destinée à recevoir la chaudière.

Les autres meubles de la laiterie sont:

1) un couloir et son support…/…

2) Différents baquets dont les uns sont plus larges que profonds, et d’autres plus profonds que larges…./…

3) Des moules ou formes. Ce sont des cercles de sapin ou de hêtre, qui ont cinq à six pouces de largeur ; une extrémité rentre sous l’autre d’un sixième environ de toute la circonférence. …/…

4) Deux écuelles, l’une plate et l’autre creuse

5) Trois espèces de moussoirs pour diviser le caille…/…

6) Une table avec un espace suffisant pour y placer le fromage lorsqu’il est dans la forme cet espace est circonscrit par une rigole qui porte le petit-lait dans un baquet…./… »



     A la fin du XVIIIème, le fromage perd un peu de terrain dans la consommation urbaine, notamment à Paris où certains bourgeois l’évitent. Les historiens s’accordent pour considérer que le XVIIIème siècle prit fin prématurément avec la chute de l’Ancien Régime et les heures cruelles de la Révolution. Ils ajoutent à juste titre qu’avec lui disparurent pour un temps le faste de la table et la recherche des éléments qui en composaient l’ordinaire.

     De toute évidence, la suppression des classes dirigeantes entraîna celle des commerçants qui étaient leurs fournisseurs privilégiés. La Révolution française dispersa les communautés monastiques et provoqua donc une réelle pénurie de fromage dans certaines régions.

     L’approvisionnement subit, de ce fait, dans les grandes villes, de sérieuses restrictions. La disette même régna durant le terrible hiver 1793-1794, les réserves étant épuisées et les échanges singulièrement ralentis par les effets de la Terreur.  Un proverbe populaire du temps de la Révolution dit « Jamais homme sage Ne mangea fromage ». Peu à peu, ce sont ainsi les fermiers qui prirent le relais des monastères dans la production de fromage.