Le fromage au XIX siècles

08. Le fromage au XIX siècles

Le fromage était encore un aliment de substitut à la viande, à cause de son prix. Il ne s’imposa définitivement autour des tables qu’aux alentours du XIXème siècle.

     En France, l’ascension du fromage, est notamment due à Brillat-Savarin (1755-1826) et à Talleyrand (1754-1838), qui offrirent aux fromages une place dans les plus hautes destinées gastronomiques.


     C’est ainsi que le premier déclara :
« Un dessert sans fromage est une belle à qui il manque un œil ».
    
     Le second déclara, lors du Congrès de Vienne en 1815, " le Brie de Maux Prince des fromages et roi des desserts ".  

     Il fallut attendre l’Empire pour que la cuisine et la gastronomie s’épanouissent à nouveau sous l’impulsion des grands cuisiniers classiques. C’est à cette époque qu’apparut le premier publiciste de la gastronomie : Alexandre-Laurent-Balthazar Grimod de la Reynière. 

     Réduit à la portion congrue après les excentricités du siècle précédent et de la Révolution, il fonda un « Jury dégustateur » qui se réunissait au très célèbre restaurant « Au Rocher de Cancale ». Il délivrait des attestations élogieuses à ceux qui lui envoyaient leurs produits à titre de « légitimations ».

     De l’autre côté de l’Atlantique, les fromages canadiens se fabriquaient artisanalement en petites quantités, même si l'on en exportait dès le XIXe siècle.
     Puis un Américain du nom de Harvey Farrington mit au point la technologie qui permettait la production de fromages à une grande échelle. Pour recueillir les énormes quantités de lait dont il avait besoin, il fit le tour des fermes ontariennes et finit par convaincre les fermiers d'abandonner leurs productions artisanales pour lui remettre le lait de leurs troupeaux. C'est ainsi que la première fromagerie industrielle s'implanta en Ontario, sous le nom de The Pioneer, en 1864. En trois ans, le nombre de petites fromageries augmenta de façon extraordinaire.

     En 1867, l'année de la Confédération, 200 d'entre elles étaient en production en Ontario seulement. C'est au Québec que s'ouvrit la première fromagerie Ecole d'Amérique du Nord. En 1881, à Saint-Denis-de-Kamouraska, un dénommé Édouard André Barnard entra dans l'histoire en transformant sa grange pour recevoir des étudiants fabricants.

     À l'école de laiterie de Saint-Hyacinthe, établissement ouvert en 1893, des pionniers toujours plus inventifs et décidés vont faire avancer les recherches en matière de fabrication des fromages. Première école de laiterie sur le continent, Saint-Hyacinthe a permis d'améliorer les techniques de centrifugation, de pasteurisation, de caillage et de découpage du caillé, tout en poussant les recherches en chimie, bactériologie et nutrition. Un des premiers pays à appliquer de façon systématique les techniques de pasteurisation, le Canada fut aussi le premier à introduire des législations strictes sur les critères de propreté et d'hygiène gouvernant la cueillette du lait et l'élaboration des fromages.

     En 1893, le ministère de l'Agriculture lança un défi à douze producteurs ontariens : fabriquer le plus gros fromage au monde!

     L’histoire du fromage va prendre un grand tournant. Pasteur découvre que des micro-organismes provoquent la fermentation de certains aliments, notamment le lait, et que ces bactéries peuvent être détruites sous l’influence de la chaleur. De 1857 à 1867, il publie des études sur les fermentations. Inaugurant la méthode des cultures pures, il établit que certaines fermentations (lactique, butyrique) où on n'avait pas aperçu de substance jouant un rôle analogue à celui de la levure (ce qui avait servi d'argument à Liebig) sont bel et bien l'œuvre d'organismes vivants.

     Il découvre un fait jusqu'alors insoupçonné : la capacité qu'ont certains organismes de vivre en l'absence d'oxygène libre (c'est-à-dire en l'absence d'air). Il appelle ces organismes anaérobies. (Les mots aérobie et anaérobie sont de lui.)
     Ainsi, dans le cas de la fermentation alcoolique, la levure tenue à l'abri de l'air vit en provoquant aux dépens du sucre une réaction chimique qui libère les substances dont elle a besoin et provoque en même temps l'apparition d'alcool.

     En revanche, si la levure se trouve en présence d'oxygène libre, elle se développe davantage et la fermentation productrice d'alcool est faible. Les rendements en levure et en alcool sont donc antagonistes. L'inhibition de la fermentation par la présence d'oxygène libre est ce qu'on appellera « l'effet Pasteur ».
     En 1863, il y a déjà quelques années que les maladies des vins français grèvent lourdement le commerce. Napoléon III demande à Pasteur, spécialiste de la fermentation et de la putréfaction, de chercher un remède. Pasteur propose de chauffer le vin à 57 °C afin de tuer les germes et résout ainsi le problème de sa conservation et du transport, c'est la pasteurisation. Il a au sujet de ce procédé une querelle de priorité avec l'œnologue Alfred de Vergnette de Lamotte, dans laquelle les savants Balard et Thenard prennent parti respectivement pour Pasteur et pour Vergnette.

Pasteur et Vergnette avaient d'ailleurs été tous deux précédés par Nicolas Appert. La découverte de la pasteurisation vaudra à Pasteur le Mérite Agricole.

     La pasteurisation du vin, bien que des dégustateurs opérant à l'aveugle eussent conclu qu'elle n'altérait pas le bouquet, fut abandonnée à l'époque de la crise du phylloxéra (fin du dix-neuvième siècle). La pasteurisation du lait, en revanche, à laquelle Pasteur n'avait pas pensé (c'est le chimiste allemand Franz von Soxhlet qui, en 1886, proposa d'appliquer la pasteurisation au lait), s'implanta durablement.

     Pasteur jette les bases de la pasteurisation, son disciple Emile Duclaux adapte ce procédé au fromage quelques année plus tard grâce à la « pasteurisation » (procédé industriel de destruction des bactéries sous température élevée), le XIXème siècle sera celui de la révolution du monde fromager, qui va prendre son essor et se diversifier pour entrer dans une nouvelle aire, celle de l’industrie fromagère.